Famille (dé)composée

Comme beaucoup d’enfants de ma génération – je suis née dans les années 80 – je suis une “fille de divorcés”. Quand ma sœur et moi étions petites, nos parents se sont séparés, mon père partant vivre en Suisse tandis que ma mère rejoignait – avec nous – celui qui allait devenir mon beau-père dans le sud de la France. Sauf qu’ils ne se sont pas arrêtés là. Et que leurs ex et nouveaux conjoints ont aussi refait leurs vies. Je vous laisse juger du bordel…

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Aujourd’hui, je suis donc l’aînée d’environ quatre enfants. Non, je n’ai pas de meilleure explication.

  • J’ai une sœur “entière”, de trois ans ma cadette.
  • Nous avons un demi-frère, né du second mariage de mon père.
  • Le second mari de ma mère avait déjà deux filles de son premier mariage et, même si nous n’avons jamais eu de lien de parenté, nous avons été en partie élevées ensemble, partageant week-ends pluvieux et vacances ensoleillées. D’un commun accord, nous nous désignons comme “belles-soeurs”, voire “ex-belles-soeurs”. C’est limite plus simple que de dire “les filles du premier lit de mon ex-beau-père” (en plus, cette expression de “premier lit”, beurk).
  • La deuxième ex-épouse de mon père a eu un autre enfant après leur séparation. J’ai donc un demi-frère de demi-frère (un quart, disons).
  • Avec sa troisième (et actuelle) épouse, mon père a eu une fille il y a un peu plus d’un an. J’ai donc une demi-soeur qui a quasiment l’age de ma propre fille.

Tout cela fait un gros foutoir, me direz-vous. Et vous aurez raison. L’idée n’est pas de me plaindre – honnêtement, à force, ça devient un sujet de blague – mais juste de relater une expérience. Cette situation de famille peut parfois donner lieu à des situations totalement ubuesques : j’ai ainsi raté le mariage de ma belle-soeur parce que mon père se re(re)mariait le même jour.

Je ne vais pas vous mentir, ça n’a pas été toujours rose. Le divorce de mes parents m’a touchée de plein fouet, d’autant, je pense, que je n’ai rien vu venir. Je me suis très bien entendue avec mon beau-père, qui a fini par disparaître de nos vies quand ma mère l’a quitté. A l’inverse, je ne me suis jamais bien entendue avec la deuxième épouse de mon père (c’est un euphémisme), et j’ai quasiment sauté de joie quand ils nous ont annoncé leur séparation. L’actuelle situation de mon père (marié à une jeune femme de trois ans mon aînée…) me fournit ample matière à mes rendez-vous chez le psy.
De tout temps, mon angoisse a été de reproduire le schéma parental. Au point qu’au début de notre relation, alors que nous parlions déjà enfants et mariage, l’Anglais a dû me convaincre à plusieurs reprises que nous formions une famille et qu’il n’allait pas se barrer du jour au lendemain (je dis ça, mais ce sont toujours les femmes qui partent, chez nous).

Après, je reste persuadée que la séparation de mes parents nous a épargné de vivre dans une famille à l’union de façade, qui aurait donné lieu à un autre type d’angoisse. La famille parfaite n’existe malheureusement pas, mais je reste convaincue qu’il doit exister une demi-mesure, une façon de préserver au maximum les enfants des désaccords (voire des conflits) des adultes qui les entourent.

7 thoughts on “Famille (dé)composée”

  1. Quand j’étais petite, j’avais un album des années 50, hérité de ma mère, qui s’appelait La famille heureuse. Ils étaient trop cools, le papa qui travaillait, la maman qui préparait le goûter, le garçon qui jouait avec ses voitures, la fille qui apprenait bien à l’école. Je les trouvais aussi super culcul et pas drôles… Nous on n’a jamais été la famille heureuse. La quasi totalité de ma famille paternelle est morte 2 ans avant ma naissance dans un accident de bateau. D’ailleurs je porte les prénoms de ma mère et de ma tante décédées, total fun. J’ai découvert à 28 ans que j’avais deux demi soeurs de 14 et 15 ans de moins que moi, que mon père a reconnues avec une autre femme, tout en étant toujours avec ma mère, qui le savait, mais ne pouvait pas nous le dire. Je ne les ai jamais recontrées. De leur côté, elles n’ont pas très bien compris, je crois, que mes parents ne sont pas séparées.Toute mon enfance, j’ai entendu ma mère dire que si c’était à refaire, elle ne se marierait pas. Et j’ai un frère, décédé à 3 semaines, quand j’avais deux ans. Je suis donc l’aînée de 6 enfants, dont 2 que je ne connais pas, et un décédé qand j’étais petite. Pour couronner le tout, je sors avec un type qui a 35 ans de plus que moi. Je ne sais donc pas si j’aurai des enfants un jour, par quel moyen, etc.
    Bref, tout ça pour dire que la famille heureuse ça n’existe pas. Je pense que bien plus de personnes qu’on ne le croit ont des histoires tordues. Je pense qu’on trimballe un sacré bagage mes soeurs et moi, mais on est vraiment une famille. Et cerise sur le gâteau, malgré ce qu’on dit, tu peux quand même faire certains choix, et décider qui est important pour toi, et pour qui ça vaut le coup de faire des efforts…

  2. Ici, les envies de divorce ont démarré quinze jours après un mariage bâclé, typiquement XIXème siècle (une oie blanche avec couronne d’oranger et contrat de mariage conséquent menée à l’autel pour épouser le type qui lui a souri une fois et dont elle n’avait même pas compris le prénom, ça fait rêver, non?), quatre ans avant mon arrivée. Le plan de vie était alors tout tracé: trois garçons, une maison en banlieue, une voiture…
    Oui, mais voilà, les futurs porteurs de moustache tant espérés n’ont jamais dépassé le stade de fausse-couche tardive, mes soeurs et moi sommes le résultat de retours de couches mal négociés…
    Etant l’aînée, je suis la première fausse note dans une partition jusque-là impeccable -selon mon père, la première fausse note entraînant la cacophonie de ce qui suit, je suis l’élément déclencheur d’une série d’échecs, sans moi tout se serait mieux passé: merci papa, j’ai treize ans et je prends ces paroles en pleine face!…
    Après plus de vingt ans d’hypocrisie à jouer le parfait petit couple en façade (mais s’écharpant ferme une fois la porte refermée et quand ça s’échauffe, il faut trouver un punching-ball pour faire retomber la pression, merci papa, merci maman), la machine judiciaire se met enfin en branle, hourra! Dix ans plus tard, la séparation de corps est enfin actée, ne reste que la séparation de biens (donc, au bas mot, dix ans de plus, chouette!)…
    Donc, bizarrement, je n’ai jamais rêvé de mariage, de robe de mariée, de bouquet… Pourtant je pense avoir trouvé mon âme soeur et je construis patiemment une petite vie simple et tranquille, avec mon homme et mes filles, tout en me garant du mieux que je peux de l’emprise toxique de mes parents…
    Dur, dur, on ne choisit pas la famille où l’on naît, fort heureusement on est acteur de la famille que l’on construit, ouf!
    Bisous à l’Anglais, la Crevette et toi, vous formez une bonne équipe, l’important est de faire de son mieux (et se remettre en question comme tu le fais est un très bon point en ta faveur!)

  3. Et pour la famille parfaite: heureusement qu’elle n’existe pas, imagines-tu la pression pour chacun des enfants de devoir faire au moins aussi bien?
    Je me félicite de ne pas être une mère parfaite, je ne tiens pas à ce que mes filles se mettent seules une pression d’enfer… et puis d’ailleurs, ce n’est pas dit qu’elles feront des bébés: mademoiselle Deuxième est contre et mademoiselle Première a une amoureuse, quant à mademoiselle Troisième, pour le moment, sa conversation se résume à “gagaga”, donc tout va bien!
    🙂

  4. Marion : je me souviens qu’on en avait parlé il y a quelques années, mais je ne me souvenais plus pour ton frère… J’imagine que ça a dû être très compliqué. Comme tu le dis si bien, la famille heureuse ne peut exister que dans un livre, et nous sommes sans doute nombreux à avoir des casseroles planquées partout. Pour être honnête, aujourd’hui j’essaie de relativiser ma situation, car elle n’est pas non plus dramatique.
    Ma principale angoisse, c’est surtout de transmettre des préjugés à la Crevette (qui en aura de toute façon, hein). Mais comme tu le soulignes, je pense que l’important désormais est de savoir faire des choix.

    Multiplemum : sympa les parents, ça fait toujours plaisir… C’est bien pour ça que je pense que les mariages de façade sont les pires et que, même si on en a ch*é à l’époque, c’était sans doute mieux que nos parents divorcent.
    Quant à ta future descendance… suspense !

  5. Même si tu m’avais déjà fait ce recensement, je ne m’étais pas rendu compte que c’était… autant. En revanche, je ne me fais pas de souci pour les valeurs que vous transmettrez à La Crevette, même si on a tous des choses pas belles à voir dans le placard.
    Et je confirme, tes deux parents n’ont pas fait dans la demi-mesure : sans connaître une foule de gens, ton schéma familial est le seul qui me fasse penser à celui d’un film. Malgré tout, j’ai l’impression que ça n’a pas donné que de mauvaises choses ^^

    De mon côté, on a une sacrée tripotée de célibataires (mon seul oncle marié a… divorcé, j’en ai un autre qui sortait avec des filles de mon âge), ambiance un peu malsaine.
    Mon compagnon a, lui, appris à 25 ans bien sonnés qu’il avait 2 demi-frères et 1 demi-sœur, qui vivent aujourd’hui avec leur père et ma belle-mère. Quand on sort tous ensemble, c’est Benetton…

  6. Histoire très étonnante que la tienne, Kleo. Même si la séparation était la moins pire des solutions., je me doute que les multiples recompositions ont du être difficiles à vivre.
    Famille “à l’ancienne ” de mon côté: mes parents, trois enfants dont je suis l’ainée. Et j’ai quand même une foule de choses à régler en thérapie… Pour ne pas transmettre certains disfonctionnements à mes enfants.

  7. @Shermane : oui, tu m’avais un peu parlé de ta famille Benetton. Mais quand les parents gèrent le truc de façon intelligente, en général ça se passe bien.

    @Lucy : je crois qu’il y a toujours des choses à régler. Je ne suis pas malheureuse non plus, même si ça m’a pas mal déstabilisée et que j’ai une trouille bleue de reproduire le schéma avec la Crevette. Après, il faut bien avancer quoi qu’il arrive !

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