Mère indigne

La Crevette va bientôt avoir un an, et je ne peux m’empêcher de ressasser certaines choses. S’il s’agit sans conteste de la personne que j’aime le plus au monde (désolée Chéri), notre relation est quand même ambiguë (enfin, de mon côté – du sien, c’est plutôt amour inconditionnel et biberons pour l’instant).

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J’aime la regarder jouer, grandir, apprendre, mais je n’aime pas m’en occuper. Je ne suis jamais plus heureuse que quand elle part le matin avec son père pour passer la journée chez sa nounou. J’appréhende le vendredi soir qui, bien que synonyme de week-end (encore que, ces derniers mois…), veut surtout dire que nous allons devoir la garder pendant deux voire trois jours entiers !
Au fil du temps, je m’aperçois que je suis plus à l’aise dans les gestes “techniques” : laver, habiller, changer… c’est cadré et ça me convient. En revanche, l’amuser réclame une énergie que je n’ai pas toujours et une inspiration qui me fait défaut ! Certes, je grossis un peu le trait, et il y a des moments où je m’en sors plus ou moins, mais j’ai vraiment le sentiment de ne pas être à la hauteur.

Alors je m’interroge. Est-il légitime d’avoir envie de refaire un enfant (pas tout de suite, hein, là, j’ai pas le courage) ? Est-il normal d’éprouver une chose pareille ? Ma Crevette va-t-elle pâtir de la situation (pour l’instant, vu ce qu’elle se marre, elle n’a pas l’air) ?
Comme quoi, on croit avoir franchi le plus dur (les nuits sans sommeil et le baby blues), et paf, une nouvelle angoisse apparaît.

Edit : en fait, j’ai rédigé ce post pendant le week-end et, depuis hier, ça va mieux. Mais il me semblait quand même important de le partager, car je sais que ces interrogations vont resurgir à un moment ou un autre.

14 thoughts on “Mère indigne”

  1. Numéro deux est épuisant. Il est très certainement précoce alors ceci explique cela. Numéro un est précoce aussi mais pas de la même façon. Et bien je peux t’assurer que lorsqu’il part à la garderie le mardi et que la garderie me le prend en liste supplémentaire les autres jours de la semaine, je saute de joie. Je ne pense pas que tu sois une mère indigne, je crois qu’il est très difficile de trouver sa place de femme quand on devient maman, moi au bout de cinq ans je n’ai pas encore vraiment trouvé … Et moi aussi j’ai le sentiment de ne pas être à la hauteur, en permanence. Bon ce commentaire ne t’aura pas vraiment aidée mais moi ça m’a fait du bien de l’écrire, je me sens seule pour le coup.

  2. Ca me rassure un peu… Je crois que je deviendrais dingue si je ne pouvais pas faire garder la Crevette à temps plein (déjà que c’est un drame quand la nounou est malade), je t’admire.
    J’ai l’impression qu’on nous met quand même beaucoup la pression sur le fait qu’une bonne mère doit être heureuse de s’occuper de ses mouflets en toute circonstance (même si, bon, tu as le droit de dire que c’est un peu fatigant, quand même, mais que ça t’apporte tellement de bonheur…).

  3. Et bien parfois j’ai l’impression de devenir dingue … mais bon en septembre numéro deux entre à l’école, je vais peut être reprendre une activité salariée … pour le moment c’est le flou total.

  4. Je te souhaite de reprendre une activité, si c’est ce dont tu as envie ! Personnellement, j’ai jonglé de la fin de mon congé mater (juin) aux premiers pas chez la nounou (fin août) et je sais que, pour le prochain, je m’organiserai plus en amont (en espérant qu’on aura les moyens…).

  5. Il faudrait que je lise plus souvent ce genre de témoignages pour éviter d’idéaliser la maternité qui m’est refusée pour l’instant. En même temps je suis sûre que je me retrouverais facilement dans ta position en tant que soeur de “LA maman parfaite”. Auxiliaire de puériculture et dingue de ses filles.

  6. Il y a un grand tabou autour de la maternité, je trouve : on est obligée d’être heureuse, puisque notre plus grand rêve s’est réalisé (en admettant que ce soit notre plus grand rêve, bien sûr). Or ce n’est pas vrai : on est crevée, on en a marre, on a envie de les balancer par la fenêtre ou juste d’appuyer sur le bouton “off”… Et on n’est pas toujours (voire rarement) la mère parfaite qu’on aimerait être !

    Ma psy dit que c’est pas plus mal, que ça veut dire qu’on est capable de se vivre autrement qu’en tant que mère (comprendre : aussi en tant que femme / personne / citoyenne…). Mais, pour être honnête, j’éprouve une grande honte à seulement parler de ça, alors qu’il est évident que je ne suis pas la seule à le vivre.

    Après, ta soeur te semble peut-être la mère parfaite… mais elle a sans doute, elle aussi, des coups de “moins bien”. Et quand bien même, dis-toi que c’est pas mal de pouvoir être pris en défaut par ses enfants : ils auront quelque chose à te reprocher pendant leur adolescence !

    Et je croise les doigts pour toi, j’y pense souvent. Courage !

  7. J’ai toujours ressenti ça, tu sais. Et j’ai fini par m’y habituer. Aujourd’hui, même s’ils sont plus grands, je leur explique : “J’adore vous câliner, sortir avec vous, vous faire faire vos devoirs, parler pendant des heures, chanter, etc. Mais ne me demandez pas de jouer avec vous. Je n’aime pas ça et c’est comme ça.”
    J’introduis doucement l’idée qu’il ne faut pas se forcer à être quelqu’un d’autre, même pour ceux qu’on aime.
    Et j’espère que nos enfants, du coup, ne souffriront pas de cette foutue culpabilité parce qu’ils auront eu un autre modèle !

  8. J’espère aussi qu’ils n’en souffriront pas !
    Merci pour ton témoignage, je me sens moins seule. C’est juste que, comme elle est encore petite et légèrement (hem) empêchée d’être indépendante, la situation est frustrante pour elle et exigeante pour nous. Je pense que ça ira mieux d’ici quelques mois.

  9. Vous êtes toutes super impressionnantes, à votre façon.
    Il me semble avoir vu passer des romans portant sur le sujet de la maternité/parentalité mais évidemment, je ne me rappelle plus de leur nom.
    Celui que j’ai commencé à lire est Lait noir, d’Elif Shafak, mais pas sûre que ce soit un remonte-moral !

  10. Dans le même genre, il y a aussi Rien de grave de Justine Lévy sur le baby blues. Mais je t’avoue que je n’ai pas forcément envie de m’en rajouter une couche 😀

  11. Bravo pour cet article qui parle très justement d’un sujet encore trop tabou. Pour ma part, la relation avec mon ainé a été beaucoup plus simple à partir du moment où il a su parler. Avant, ses petits yeux pleins d’amour et de confiance m’angoissaient au possible, je ne me sentais pas à la hauteur de ce que je supposais qu’il attendait de moi…
    Je profite pour faire un peu de pub à la ligne verte qui m’a bien soutenue dans certains passages à vide (“Est-ce que je l’aime, finalement ?”) : allo parents bébé, 0800 00 3 4 5 6

  12. Je pense que le souci avec la Crevette est surtout sa dépendance totale à l’heure actuelle : en novembre, on arrivait à un compromis, je pouvais la laisser tranquille une vingtaine de minutes, elle s’amusait toute seule… Là, c’est quand même beaucoup moins le cas, et je pense que, si moi ça me gonfle, elle, ça la frustre. Il ne reste plus que quelques mois à tenir, après ça devrait évoluer un peu.
    Et tu as raison de faire de la pub à cette ligne d’écoute, je ne connaissais pas du tout.

  13. J’avais loupé ce billet.
    Je me retrouve beaucoup dans ce que tu dis à propos de la crainte de ne pas être la mère parfaite. Je culpabilise souvent quand mes enfants sont après moi pour lire, jouer et que j’ai envie de faire autre chose. Ça dépend beaucoup de mon degré de fatigue mais il m’arrive d’avoir envie de les envoyer balader alors qu’ils ne suivent partout avec leurs petites bouilles rondes et leurs yeux pleins d’amour. Quand Poupette (4 ans) me tanne pour jouer avec ses lettres et apprendre à lire, je me sens garce d’en avoir marre de répéter que P-A-P-A ça fait papa.
    Petit a petit, en les voyant capables de se détacher quelques minutes, j’arrive à optimiser ces instants en les consacrant à mes loisirs. Tant pis pour les tâches ménagères!
    Bref, ou nous sommes des mères indignes ou nous sommes humaines, tout simplement.

    Et puis quand j’étouffe. Hop, un coup de TGV et me voilà à Paris. Monsieur prend le relai 2jours à charge de revanche!

  14. Waouh ! Elle réclame d’apprendre à lire à 4 ans ? Il faut qu’on lui présente mon neveu, alors, ils auront plein de choses à se dire.

    Plus sérieusement, c’est clair qu’en ce moment je suis crevée et que je prends les situations avec moins de patience et de bonne volonté. Ce qui n’empêche pas, bien évidemment, de culpabiliser, parce qu’on se dit que nos enfants ne devraient pas en pâtir…
    Beuh, c’est vraiment un cercle vicieux !

    Plus sérieusement, je pense en effet que c’est aussi dû au fait qu’on se met la pression pour tout réussir à la perfection et que, heureusement la perfection n’est pas de ce monde !
    J’avoue avoir un peu de mal de mon côté à planter tout le monde pendant deux jours, pour l’instant. il faudrait peut-être…

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