Le Misanthrope

LeMisanthropeJeudi soir, grâce à l’Américaine qui accompagnait ses étudiants, j’ai pu retourner à la Comédie-Française pour assister à la représentation d’une nouvelle pièce de Molière, Le Misanthrope.
Alceste hait l’humanité tout entière, il dénonce l’hypocrisie, la couardise et la compromission. Mais il aime pourtant Célimène, coquette et médisante. Le vertueux se lance ainsi dans des combats perdus d’avance qui l’acculent à la fuite…


Alors que la pièce est célèbre, j’avoue que je ne l’avais jamais vue ni lue. Pour être honnête, je n’en connaissais même pas l’argument. Et ce n’est pas faute, comme à peu près 90% des élèves de France et de Navarre, d’avoir étudié Molière à l’école ! Cette oeuvre est plus sérieuse que la majeure partie de la production de l’auteur, qui vécut, l’année de sa composition, plusieurs trahisons personnelles. On y relève une amertume qui s’exprime essentiellement dans le personnage principal, mais pas seulement.

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La version proposée cette saison est… longue, avouons-le. Si les acteurs sont, comme toujours, excellents, le metteur en scène a pris le parti d’étirer certains moments pour renforcer la tension dramatique. Or, cela fonctionne bien pendant toute la première moitié de la pièce, qui demeure assez enlevée, mais s’enlise lentement mais sûrement dans la seconde (surtout quand on a un train à attraper à l’autre bout de Paris).
Certains choix sont toutefois bien vus : avoir déplacé le cadre dans une gentilhommière, probablement pendant les années 1950-60, est intelligent, car cela permet de souligner la modernité du propos. De même, la scène du repas est très vivante et offre un excellent moment de comédie.
Toutefois, et c’est sans doute aussi un des problèmes de la pièce, le personnage d’Alceste est profondément antipathique et, à un moment donné, on a juste envie de dire aux autres “Mais laissez-le se démerder tout seul !”. Sa volonté de prendre en défaut tout et tout le monde est fatigante, et l’on a du mal à comprendre pourquoi les personnages qui évoluent autour de lui persistent à le trouver “aimable”.

Du coup, je suis très mitigée sur cette pièce. D’un côté, je suis ravie d’avoir pu écouter la langue de Molière, surtout quand elle est si bien interprétée. De l’autre, je me suis quand même un peu ennuyée, et c’est fort triste. Peut-être faudra-t-il retenter ma chance avec une autre mise en scène à l’occasion ?

Le Misanthrope, Molière, Salle Richelieu, jusqu’au 8 décembre

Tartuffe

Hier soir, grâce à une amie, j’ai été invitée à la Comédie-Française pour assister à une représentation de Tartuffe. Je ne sais pas vous mais, personnellement, des pièces de Molière, j’en ai étudié une par an de la 6ème à la 2nde – et celle-ci, en particulier, fut l’objet d’un trimestre la dernière année. Même si mes années de lycée sont loin derrière moi, je gardais tout de même assez de souvenirs de cours pour savoir à quoi m’attendre.

Tartuffe

Dans la maison d’Orgon, deux camps s’opposent : celui du maître de maison et de sa mère, qui ne jurent que par Tartuffe, un homme qui se dit dévot et prend lentement mais sûrement l’ascendant sur eux et la maisonnée, et tous les autres, épouse, enfants, domestiques, qui n’en peuvent plus des manières de l’hypocrite personnage. Mais Orgon est aveuglé de passion pour son “frère” ainsi qu’il l’appelle, au point de vouloir lui donner sa fille en mariage et de déshériter son fils à son profit. Seule Elmire, sa femme, parviendra à lui ouvrir les yeux en révélant la vrai nature de Tartuffe.

Cette pièce a connu une histoire compliquée, faite de soubresauts et de cabales, dont je vous épargnerai les détails ici. Toujours est-il que, plus de trois siècles après sa création, elle a toujours le même à-propos, la même puissance comique et trouve une résonance jusqu’à nos jours. On rit franchement de situations qui pourraient exister à notre époque, quoique peut-être dans un autre contexte que celui de la religion.

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La version présentée ce soir est excellente : les acteurs sont très bons (en même temps, au Français…), la mise en scène est bien faite, avec juste ce qu’il faut de modernité pour dépoussiérer l’oeuvre, le décor est génial, sans doute un de mes plus gros coups de coeur de la soirée : une pièce dotée de deux portes et donnant sur d’autres pièces en enfilade où évoluent les acteurs. Les portes claquent, on se poursuit, on se fuit, on s’embrasse, on se jette des reparties cinglantes et des objets à la figure… Franchement, j’ai passé un très grand moment.
Un tout petit bémol, néanmoins : selon l’endroit où se placent les acteurs, l’acoustique change. Alors qu’elle est très bonne dans la majorité des cas, les voix paraissent parfois étouffées voire donnent l’impression de faire vibrer le bois. Mais je vous rassure, c’est assez ponctuel.

Maintenant, effet KissCool : mon cerveau m’a parlé en alexandrins tout le reste de la soirée et une partie de la matinée. Quel frimeur.

Tartuffe, Comédie-Française (salle Richelieu), jusqu’au 16 février 2015
Les images qui illustrent cet article sont tirées du site de la Comédie-Française.