Récital Dmitri Hvorostovsky

dmitri-hvorostovsky-theatre-du-chatelet-paris-01Quand votre binôme d’opéra (coucou Leen !) commence à vous surnommer “partner in crime”, c’est sans doute que vous tirez un peu sur la corde. Il y a 10 jours, au sortir des Contes d’Hoffmann, nous sommes passées devant une affiche annonçant le récital de Dmitri Hvorostovsky au théâtre du Châtelet la semaine suivante, et Leen s’est mise à faire des bonds de cabri en disant qu’il fallait absolument qu’on essaie de dénicher des places. Coup de bol, grâce à une opération spéciale sur le site de la Fnac, elle nous en a dégoté deux en première catégorie à moitié prix. Jeudi dernier, donc, nous voilà très bien placées en corbeille, sans poteau, et c’est parti.

Dmitri Hvorstovsky est un baryton russe originaire de Sibérie, qui a remporté de nombreux prix, notamment celui de “Singer of the World” en 1989. Surtout, son histoire récente est une belle leçon de vie : diagnostiqué à l’été 2015 d’une tumeur au cerveau, il accomplit actuellement son retour sur scène. On pouvait donc se poser la question de sa prestation et son endurance sur scène…

Le programme du récital appuie son nouvel album, et est consacré à des pièces de Glinka, Rimski-Korsakov, et Tchaïkovski, ainsi qu’à des lieder de Richard Strauss. Le thème récurrent en est l’amour, la tristesse, la beauté… A certains égard, cela m’a rappelé le concert de Diana Damrau de mars dernier.
Sur scène, Hovrostovsky a une présence imposante, à la fois due à sa carrure et sa chevelure toute blanche, mais aussi à l’espèce de calme et de maîtrise qu’il dégage. Passée la première adaptation nécessaire (pour moi) d’entendre un baryton chanter accompagné du seul piano, on est complètement happé par cette voix grave capable de susciter des émotions incroyables. De la tristesse à l’élan de joie, de l’introspection à l’exubérance, on tremble, on vibre, on sourit, on pleure au gré de ses notes.
Hovrostovsky est un personnage en soi, qui joue un peu de cette image, mais sans non plus trop en faire. A titre personnel, j’ai été transportée sur la dernière pièce de Tchaïkoski, “Première rencontre”. Rien que pour cet air, le concert en valait la peine. L’ultime rappel, un air de Iago dans l’Othello de Verdi m’a confirmé ce que je soupçonnais depuis le début du récital : il faut absolument qu’on aille l’écouter dans un opéra.

Passion au Théâtre du Châtelet

affiche_passionHier soir, j’ai eu l’immense chance d’être invitée à la générale de Passion, la nouvelle comédie musicale de Stephen Sondheim (un monument du genre) présentée par le Théâtre du Châtelet, mise en scène par Fanny Ardant et dont le rôle principal est interprété par Natalie Dessay. Excusez du peu.

Adapté du film Passion d’amour d’Ettore Scola – non je ne connaissais pas – le musical raconte l’histoire de Fosca, femme plus si jeune, laide et gravement malade, qui s’entiche et s’entête à aimer Giorgio, un bel officier dont le coeur est déjà pris. Obsédée par lui, elle le harcèle tandis qu’il ne cesse de la repousser, jusqu’à l’ultime moment où il se rend compte que nul ne l’a aimé comme Fosca.


Les interprètes sont excellents. Natalie Dessay, bien entendu, qui confirme qu’elle est à l’aise dans tous les registres, interprétant ce rôle avec puissance sans pour autant jouer les divas (au propre comme au figuré), donnant à son personnage une force qui affleure sous la débilité physique, parvenant à rendre sympathique cette femme au premier abord détestable et agaçante.

©Théâtre du Châtelet - Marie-Noëlle Robert
©Théâtre du Châtelet – Marie-Noëlle Robert

Les autres ne sont pas en reste, en particulier Ryan Silverman en Giorgio qui occupe presque tout le temps la scène, interprétant tout en nuance un personnage qui pourrait facilement passer pour monolithique. Enfin, Erica Spyes, qui incarne Clara, la maîtresse bien-aimée du héros, propose un très beau contrepoint au personnage de Fosca, sans pour autant tomber dans la caricature éthérée. Le reste de la distribution est à la hauteur.
L’histoire avance tambour battant – rythmée justement par des percussions aux sonorités militaires – et il n’y a pas de temps mort. Elle est en outre très bien servie par des changements de décors rapides et des costumes somptueux (ah, ces robes, ces uniformes !).

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©Théâtre du Châtelet – Marie-Noëlle Robert

Attention, il s’agit d’une comédie musicale à moité chantée et à moitié jouée en anglais (le surtitrage est nickel) et, contrairement à d’autres productions, il n’y a pas de “tube” qu’on pourrait retenir facilement, plutôt des airs que l’on entend de façon récurrente tout au long du spectacle. La part belle est faite aux parties jouées et aux récitatifs plutôt qu’à d’éventuelles “arias”.
Quoi qu’il en soit, c’est un très beau spectacle, poignant sans donner dans le larmoyant, porté par un excellent casting. Je ne peux que vous recommander d’y aller !

Passion, au Théâtre du Châtelet, du 16 au 24 mars 2016