Dans un quartier populaire de Tokyo, Sen tient une minuscule dorayaki-ya, une échoppe où l’on prépare et vend des dorayaki, pâtisserie traditionnelle japonaise. Autour de lui gravite un tout petit monde, en particulier Wakana, une jeune collégienne qui rêve d’aller au lycée (l’éducation n’est obligatoire que jusqu’à la fin du collège au Japon, et on entre au lycée sur concours) et dont la mère brille souvent par son absence. Un jour, arrive Tokue, une vieille dame très déterminée à devenir son employée, et qui finit par s’immiscer dans sa cuisine et son échoppe, notamment en lui apprenant à confectionner une an (pâte de haricots rouges) digne de ce nom…
Au premier abord, on pourrait croire à l’un de ces films japonais “classiques”, où l’on voit défiler les saisons, la vie de quartier, le quotidien et l’extraordinaire… une de ces chroniques dont les Japonais – comme les Occidentaux – sont friands et qui nous peindrait un Japon à la fois proche, pittoresque et savoureux. Et certes, la nourriture – en particulier cette fameuse pâte de haricots rouges – est au cœur de la narration, mais l’histoire ne s’arrête assurément pas là.
Ce serait sous-estimer Naomi Kawase que de croire qu’elle va nous servir (excusez la métaphore) un joli film mignon. Peu à peu, elle aborde des thèmes beaucoup plus durs, en particulier l’exclusion de certaines catégories sociales – une question de société très prégnante au Japon, notamment avec le cas des burakumin – la rumeur et l’isolement. Ces sujets sont traités avec délicatesse mais sans fard, et révèlent le rapport compliqué des Japonais à leur propre passé (même si je pense qu’on pourrait dire ça de presque tous les peuples).
Dernier point : la traduction des sous-titres est impeccable (allez, pour mégoter, on va dire que, selon moi, il était inutile de traduire “shiso” par “pérille”).
En résumé, c’est un excellent film, qui vous tirera peut-être quelques larmes, mais que j’ai trouvé juste, touchant et prêtant à la réflexion. Lou², qui m’accompagnait, m’a quand même fait valoir que c’était beaucoup plus optimiste que la majeure partie de l’oeuvre de la réalisatrice et, vu qu’elle s’y connaît beaucoup mieux que moi, je la crois sur parole. En revanche, vous risquez d’avoir envie de manger des dorayaki en sortant.