Cendrillon

Qui ne connaît pas le conte de Cendrillon ? Dans cette version de Rudolf Noureev, Cendrillon est exploitée par sa méchante belle-mère et ses deux belles-sœurs dans le bar familial. Un producteur de cinéma qu’elle soigne à l’occasion d’un accident joue le rôle de sa bonne fée et lui accorde le premier rôle dans une nouvelle production. Cendrillon fera la connaissance de son prince en la personne de l’acteur-vedette, mais ne devra pas oublier les douze coups de minuit…


Je ne connaissais pas ce ballet, ni même la musique qui l’accompagne – contrairement à beaucoup de ballets classiques, la partition n’a pas été reprise dans le dessin animé éponyme de Disney. Mais pour moi ballet classique + Noureev + opéra de Paris, ce ne pouvait être qu’une bonne surprise. Ayant récupéré la place de Leen qui ne pouvait assister à la représentation, j’ai même réussi à convaincre l’Anglais de m’accompagner.

Force est de constater que ça a un peu vieilli. Transposer l’histoire de Cendrillon dans le Hollywood des années 1920 n’est pas une mauvaise idée, mais Noureev a semble-t-il voulu se faire plaisir sans trop de cohérence. Au-delà des pas classiques, on trouve aussi un numéro de claquettes (en partie couvert par l’orchestre) et des variations plus contemporaines (notamment les Heures).
Si la danse conserve la plupart du temps un côté intemporel, l’aspect visuel du ballet a pas mal souffert : c’est une oeuvre de 1986, et les costumes comme les décors sont très marqués par leur époque – je précise que je suis presque en train de commettre un crime de lèse-majesté familial puisque les décors sont l’oeuvre d’un cousin de mon père. Dès qu’on s’éloigne des tenues 1920s/flapper, on bascule dans le kitsch d’un goût un peu douteux. Si j’avais déjà noté ce problème dans Le lac des cygnes, cette fois-ci ça saute aux yeux. Pour un art aussi visuel que la danse, c’est mortel.

Mais qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse. Et la danse, qu’en est-il ?
Justement… Le ballet de l’Opéra de Paris est en crise, on le sait, mais ce soir, on l’a senti sur scène. Rien de dramatique, mais il y a eu des imprécisions à plusieurs reprises, des petits décalages… Ludmila Pagliero et Germain Louvet, dans les rôles principaux, sont d’excellents danseurs, mais force est de constater qu’il ne se passe pas grand-chose entre eux – seul leur pas de deux dans le deuxième acte a su me toucher.
En réalité, ce sont surtout les seconds rôles qui m’ont plu : Emilie Cozette et Ida Viikonski en belles-sœurs bouffonnes et, surtout, Alexandre Gasse en belle-mère (bravo pour le travail sur pointes !).

Alors faut-il jeter Noureev avec l’eau du bain (et Aurélie Dupont…) ? J’ai l’impression que l’ancien directeur de la danse est devenu une statue du Commandeur encombrante qui sclérose le ballet et l’empêche, à l’heure actuelle, d’évoluer vers le 21ème siècle. Je n’ai pas la prétention de m’y connaître en profondeur, mais c’est un ressenti global.

(Et bordel, qu’on nomme François Alu étoile, quoi.)

Cendrillon

CendrillonLe père d’Ella, un marchand, s’est remarié après la mort tragique de la mère de la jeune fille. Pour l’amour de son père, Ella accueille à bras ouverts sa nouvelle belle-mère et les filles de celle-ci, Anastasie et Javotte. Mais lorsque le père d’Ella meurt à son tour, la jeune fille se retrouve à la merci de sa nouvelle famille, jalouse et cruelle. Les trois méchantes femmes font d’elle leur servante, et la surnomment avec mépris Cendrillon parce qu’elle est toujours couverte de cendres…


Je le disais il y a quelques semaines, j’adore les contes de fées depuis toujours. Lorsque ce film est sorti au cinéma, j’ai regretté de ne pas avoir le temps ni l’énergie d’aller le voir. Aussi est-ce avec joie que j’ai découvert qu’il était disponible sur le système de divertissement en vol lors de mon trajet Paris-New York.
On m’avait dit que les costumes étaient très beaux et, effectivement, ils le sont. J’ai beaucoup apprécié l’idée d’habiller les “bons” héros en tenue 19ème et de laisser la méchante belle-mère et les belles-soeurs en tenues de la première moitié du 20ème siècle. Cate Blanchett est magnifique dans ses robes 1930-50 alors que ses filles sont parfaitement ridicules dans leurs vêtements rigoureusement assortis, ce qui est sans nul doute le but. En revanche, j’aimerais qu’on m’explique comment Lily James fait pour avoir une taille aussi fine… La rumeur disait que celle-ci avait été numériquement rétrécie, et j’aurais tendance à le croire !

Cendrillon2

Néanmoins… c’est à peu près l’unique qualité du film à mes yeux. On suit les mésaventures de Cendrillon à un rythme régulier, jusqu’à la fameuse rencontre avec le prince. Et force est de constater qu’en fait, il ne se passe rien. Le prince – Richard Madden, alias Robb Stark – contemple de ses (très beaux) yeux bleus le vide intersidéral du scénario. Lily James sourit toujours ou presque. Les héros échangent à peine quelques banalités mais tombent éperdument amoureux l’un de l’autre sans qu’on en connaisse exactement les raisons – au moins dans A tout jamais, la version de Cendrillon avec Drew Barrymore (dont je suis très fan), l’héroïne faisait la morale au prince et ne s’en laissait pas conter.

Mais ce qui m’a le plus dérangée, c’est la passivité de Cendrillon. Certes le personnage n’est pas le plus intéressant des contes de fée, mais elle persiste à s’humilier et à répéter comme un leitmotiv la recommandation de sa mère mourante “Sois courageuse et gentille” dès qu’une avanie lui tombe sur la tête. Moi, j’aurais plutôt envie de lui foutre des baffes. Elle est incapable de se prendre en main et attend qu’on vienne la sortir du guêpier. Même lorsqu’il est question d’essayer la pantoufle, elle ne bouge pas du grenier où on l’a confinée, se contentant de pleurer son amour (presque) perdu et d’être sauvée par le prince en personne.
Le seul moment où l’intrigue s’éloigne un tout petit peu du dessin animé et où Ella semble manifester un semblant de personnalité est gâché moins de 10 minutes plus tard lorsqu’elle annonce royalement à sa belle-mère : “Je vous pardonne”. Aurait-il été si compliqué d’insuffler davantage de modernité à ce personnage ?
Au final, vous vous en doutez, j’ai été très déçue. Surtout, je suis un peu inquiète car c’est typiquement le genre de film que j’irai volontiers voir avec la Crevette quand elle sera plus grande, et je n’aime pas du tout l’image de la femme qu’il véhicule : soit elle se soumet docilement et sera sauvée par l’ “amour”, soit elle se révolte, tente de se frayer sa propre route et devient la méchante, la sorcière. Si le conte d’origine n’était pas forcément très subtil, cette version est franchement rétrograde.