Bonne lecture… A suivre, la réponse d’Ei.
Je suis épuisé… Essayez de suivre pendant deux jours une marche forcée avec les fers aux pieds et les mains liées. Alors quand en plus on a une constitution comme la mienne ça relève de l’exploit. Ils me sont tombés dessus il y a deux jours alors que je me reposais tranquillement sur un coté de la route, sans me laisser le temps de m’expliquer, ils m’ont intégré à un groupe d’hommes et femmes prisonniers, qui m’ont tous regardé avec méfiance, refusant de me parler. Depuis ils me frappent dès que j’ouvre la bouche, alors je me tais. Quand je suis tombé il y a quelques heures ils ont frappé dans mes côtes à coups de pieds. On m’a traité de barbare, mais au moins chez nous les prisonniers sont mieux traités que ça, ne serait-ce que pour qu’ils puissent venir grossir les rangs de nos hordes.
Nous débouchons dans une clairière, aménagée en campement. Rien à voir avec nos forteresses, cette odeur… Ah enfin, je l’ai retrouvée… Oui ma compagne de toujours, c’est son odeur, enfin… Après tant de recherches j’ai enfin pu la retrouver, elle me manquait tant que j’ai quitté mes steppes et ma taïga.
Les soldats me conduisent vers une femme, lui tend mon bâton et ma dague. « On a trouvé ce barbare à deux jours de marche en direction d’Aoni, sans doute un espion, dans le doute on a préféré vous l’amenez pour l’interroger … » Je ne prête plus attention a leur paroles vides de sens. Je sens mon apparence provoquer attirance et répulsion à la fois. Ma tunique noire à bordures rouge sang ainsi que ma cape ornée d’une peau d’un loup des neiges, avec ma peau au teint blafard et mes cheveux noirs qui retombent devant mes yeux gris. Mon regard se fixe sur la tente derrière eux. Ca y est je t’ai retrouvée, ma compagne de toujours.
Je suis Evgueiev de la tribu des Ashakry. Je viens de ces contrées du Nord Est, où les hommes sont vêtus de fourrure et où les enfants apprennent à manier la hache dès 8 ans. Nos guerriers sont des géants de 2 mètres dont les hurlements et la charge ferait trembler n’importe quelle armée entraînée. C’est sûr que quand tu en fais qu’un mètre soixante comme moi et que tu boîtes un peu, tu risques plus de finir comme cuisinier ou paysan pour approvisionner les troupes. C’était sans compter sur un soutien du destin puisque mon oncle, Iegor, était l’un de nos sorciers. Quand mes cousins ont commencé à jouer avec leurs haches en bois, Iegor est simplement venu voir mes parents et ma confié un bébé lynx. Il m’a dit d’en prendre soin comme si c’était mon frère, ce que j’ai fait. Quand il a considéré qu’il était temps pour moi de devenir son apprenti, il m’a fait l’égorger. Il paraît que ce jour-là mes yeux noirs sont devenus gris, moi je ne me souviens plus. Pour moi c’est ce jour-là que je L’ai rencontrée, ce jour où ma tribu a appris que je serai leur prochain sorcier de la mort, ou nécromancien comme disent les « civilisés » avec cette once de terreur dans la voix.
Mon frère lynx ne m’a jamais quitté depuis, son crâne sert de boucle à ma besace, qui contient mes parchemins d’études. Ses pattes sont le manche de ma dague que le soldat tend à sa maîtresse, avec une lame d’acier ashkary, après tout je suis quelqu’un d’important chez moi. Pendant presque 12 années j’ai vécu avec la mort, compris sa méthode, son ironie. Je ne la crains plus, un jour nous nous retrouverons pour de bon, comme tous ces gens ici, ce garde arrogant, ces paysans affolés, cette jeune commandant, j’esquisse un sourire ironique, il se battent mais au final eux, leurs ennemis, tout le monde tombera.
Aujourd’hui je peux commander aux corps et aux esprits morts, je n’ai pas le talent de mon oncle mais cela viendra. Il y a 6 mois Iegor m’a fait entrer dans son ultime refuge, il semblait épuisé. Il m’a dit que la mort sa compagne de toujours avait abandonné la contrée et qu’il sentait ses forces s’épuiser, il m’a dit de partir à sa recherche, en me confiant ce bâton surmonté d’une pierre blanche. Depuis j’ai exploré leur « royaume », et cherché en vain jusqu’à ce matin.
Mes lèvres esquissent un sourire fatigué, la jeune femme s’approche de moi, mon bâton noir dans une main. Lorsqu’elle est à moins d’un mètre de moi, une flamme froide et verte entoure la pierre…
Quand elle se tient devant moi, je ne lui laisse pas le temps de commencer à parler…
« Je suis Evegueiev, de la tribu Ashkary et je ne suis pas votre ennemi. »