Bien avant les étreintes sur couvertures et les arracheurs de corsages, les romans d’amour avaient la mauvaise réputation d’être une sous-littérature pour femmes au foyer et vieilles filles désespérées. Mais pourquoi ces livres – qui sont une échappatoire et un divertissement de choix pour des millions de femmes – ont-ils été marqués du sceau du mépris et de la honte ?
Dangerous books for girls passe en revue l’histoire secrète de la mauvaise réputation de ce genre […] et montre comment les romans d’amour ont inspiré et donné à des générations de femmes le pouvoir de rêver en grand, de refuser de se taire et de croire qu’elles en valent la peine.
Maya Rodale est auteure de romance et chercheuse. J’avais pu découvrir le début de son ouvrage l’an dernier, lorsqu’il a été publié sur Internet et relayé par beaucoup d’autres auteures que je suis. Du coup, lors de mon passage à la convention RWA en juillet, je me suis offert cet ouvrage (l’un des deux seuls livres que j’ai payés de ma poche).
L’auteur propose une défense du genre cliché par cliché, en montrant combien le roman en lui-même est mal perçu depuis ses débuts. Que l’on mette en doute la moralité des auteures, les espérances folles que ces récits feraient naître chez les lectrices (jamais chez les lecteurs, notez bien), ou le fait que la romance ne serait qu’un genre bon pour des femmes quasi-illettrées, c’est toujours la même idée qui prédomine : parce que “féminin”, le genre est déconsidéré. Parce qu’il s’adresse aux femmes, qu’il est produit par des femmes, qu’il met des femmes au cœur de ses récits et – surtout ! – parce qu’il propose une fin heureuse.
En gros, la morale n’est pas sauve, et Maya Rodale soutient (et je suis parfaitement d’accord avec elle) que l’immense problème de la romance, c’est qu’elle donne à voir aux femmes qu’autre chose est possible, qu’elles peuvent sortir de chez elle, arpenter le monde, avoir des orgasmes et le bonheur à la fin. Il est beaucoup question d’espoir et d’amour, deux traits visiblement mal considérés s’ils ne sont pas “punis” socialement d’une façon ou d’une autre.
Mais surtout, Maya Rodale conclut de façon très intelligente en expliquant que le problème de la mauvaise réputation de la romance est intimement lié à celui de la condition féminine : tant qu’on méprisera les femmes, on méprisera un genre qui s’adresse à elles.
J’ai beaucoup aimé cette lecture, facile et rapide, souvent drôle. L’auteure se lance dans une “défense et illustration de la romance”, et offre beaucoup d’arguments en faveur du genre. En outre, elle propose une explication intéressante de certains phénomènes qui peuvent paraître incompréhensibles (le petit ami qui contrôle tout, le viol fréquent dans les romances 1970s…) et ont franchement éclairé ma lanterne. Ainsi, si je n’aime toujours pas 50 shades of Grey (en particulier parce que je trouve ça très mal écrit), je conçois l’attrait que cela peut exercer, même si ça ne me parle pas.
Un ouvrage intéressant, donc, et pas seulement pour les fanas du genre, à mon avis.