Note : cet article n’est en aucun cas un document scientifique ou médical. Il s’agit de notre témoignage et de notre expérience de parents d’un enfant atteint d’une luxation congénitale de la hanche. Pour en savoir plus, l’histoire commence ici et se poursuit là.
Suite à son séjour à l’hôpital, la Crevette repartait donc avec nous à la maison, mais lestée de plâtre. En effet, après avoir passé un mois à placer sa hanche en position orthopédique, il fallait maintenir le tout pour permettre aux articulations de se consolider, mais aussi pour éviter de perdre tous les bénéfices de la traction et de provoquer une reluxation. La pose du plâtre se fait au bloc, sous anesthésie générale, et dure une petite heure.
Pour être honnête, l’orthopédiste n’était pas très contente, arguant que sa hanche était “une vraie savonnette”. Elle a demandé une IRM pour s’assurer que rien ne bougeait (je vous raconte pas la joie pour faire passer une IRM à un bébé de pas tout à fait 10 mois vu le bruit que fait le machin) mais, heureusement, celle-ci a été concluante.
La position plâtrée était pour le moins surprenante : en grand écart facial avec les pieds tournés vers l’intérieur. La comparaison la plus parlante, pour nous, a été celle du gardien de hockey en train de faire un arrêt. Le plâtre, dit “pelvi-pédieux” puisqu’il va du pelvis aux pieds (cheville à droite, orteils à gauche), remontait dans le dos jusqu’aux omoplates, faisait un “U” au niveau du ventre pour laisser de la place lors des repas et était creusé au niveau du siège pour le change.
Impressionnant mais, comparé à l’hôpital, le bonheur car on est “libres” de nos mouvements et, surtout, on pouvait la prendre dans nos bras et lui faire des câlins. Pour mademoiselle, c’était surtout un environnement moins angoissant et la disparition des (rares) douleurs musculaires occasionnées par la traction.
D’un point de vue pratique, ça se passe comment ?
La première chose à faire, c’est de cesser d’attraper son enfant sous les bras ! Parce que sinon, le poids du plâtre se fait vraiment sentir, pour lui comme pour vous. On la tenait donc par la taille. Ca demande un peu d’entraînement (et ça fait les biceps), mais rien de traumatisant.
Pour le bain, ce fut le grand retour de la toilette au gant sur la table à langer. Et pour être sommaire, c’était sommaire… car il est interdit de mouiller le plâtre pour éviter les déformations. Du coup, on débarbouille les bras, le haut du torse et le visage, on lave les cheveux de façon acrobatique de temps à autre, ainsi que le pied à l’air, et terminé.
Pour le change, il fallait glisser une couche de petite taille sous le plâtre après avoir arraché les scratches et maintenir celle-ci par une seconde couche plus grande passée par-dessus le plâtre. Non, c’est pas simple, surtout la nuit.
Et niveau hygiène en général ?
Au bout de quelques jours, le plâtre sent un peu la mort, et ça va durer pendant tout le traitement… En gros, on peut intervenir sur certaines zones (je décrassais les pieds/orteils tous les 2-3 jours, c’était pas triste), en priant pour que ça passe. Chance monumentale : nous avons eu un seul accident de couche très circonscrit, ce qui n’est apparemment pas le cas de tout le monde.
Pour l’habillement, ça donne quoi ?
Nous étions en plein hiver (début janvier), il fallait donc veiller à ce que la Crevette ne se refroidisse pas. Du coup, le pied dont seuls les orteils dépassaient était constamment enveloppé dans une chaussette de Monsieur (les seules assez grandes pour que ça marche), et l’autre pied était couvert d’une chaussette et d’une petite tennis basse (les autres chaussures étaient trop montantes). Plus tard, une fois la jambe droite en partie dégagée, j’ai pris l’habitude de lui enfiler une jambière (choisie parmi celles achetées lorsqu’elle avait son harnais).
L’enfant se retrouve avec un tour de taille d’un gamin de 2-3 ans environ, si bien qu’il est impossible de l’habiller convenablement – c’est du bricolage. Mademoiselle a donc porté des robes évasées en permanence, en taille 24 mois, alors qu’elle n’en avait que 9. Pareil pour les quelques t-shirts. En revanche, bien entendu, plus de pantalon, de body, ou de pyjama (j’ai vu sur certains témoignages des parents qui parvenaient à mettre des pyjamas taille 3/4 ans). Avantage : cet hiver, j’ai pu ressortir presque toute la garde-robe de l’hiver dernier, qui est déjà à sa taille.
Et dans la vie de tous les jours ?
Plus question d’utiliser notre transat, dont la capacité était limitée à 9kg, mais la nounou a pu garder le sien (qui supportait jusqu’à 15kg). A la maison, nous l’avons remplacé par un Doomoo de Babymoov (blanc/ivoire), assorti d’un gros oreiller pour maintenir la Crevette en position assise verticale. Comme ce truc coûte une blinde, on se l’est fait offrir à Noël.
Pour les repas, c’était essentiellement dans le doomoo. Mais à la fin, quand mademoiselle en a eu marre, on l’installait (en la ceinturant avec un foulard…) dans sa chaise haute (le truc hyper design et hyper cher, de Stokke).
Pour les déplacements, c’était tout aussi folklorique : terminée, la poussette trois positions. Il nous fallait une poussette canne, la plus simple possible, car sinon les jambes ne tenaient pas. On rembourrait dans le dos avec une couverture et, par temps froid (soit tout l’hiver), on enveloppait les jambes dans une autre couverture. Mademoiselle n’aimait pas trop ça, et râlait au bout d’une vingtaine de minutes en moyenne.
En voiture, il existe – ô miracle – un modèle de siège auto : le Opal dysplasie de Bébé Confort. Celui-ci est gracieusement mis à disposition par la société pour six mois, moyennant un certificat médical et un chèque de caution de 250€. Sachant que nous avons pu prolonger l’emprunt de 3 mois avec un simple justificatif du pédiatre. Donc, normalement, je ne fais pas de pub, mais là, si, c’est obligé. En plus, la personne qui gère les dossiers est très aimable et humaine (nous avons surtout échangé par mail).
Ca dure longtemps ?
Ca dure quatre mois. Ou plutôt, deux fois deux mois, parce qu’on doit changer le plâtre au milieu. Pas pour des considérations d’hygiène, non, mais parce que les enfants grandissent. Là encore, cela se fait au bloc, sous anesthésie générale, mais cette fois-ci, en ambulatoire. On arrive le matin, avec un bébé à jeun et toiletté à la bétadine, et on repart en début d’après-midi.
Gros bémol : nous n’avons pas pu accompagner la Crevette jusqu’au dernier moment, il a fallu la remettre à l’anesthésiste (et là, je ne vous raconte pas les hurlements de terreur, vu qu’elle était déjà en blouse et en charlotte de bloc, et qu’elle avait compris qu’il allait se passer un truc désagréable).
Quand on nous l’a rendue, surprise ! La jambe droite était libérée juste au-dessus du genou, ce qui allégeait un peu le poids total de la bête. En revanche, ils n’avaient que de la résine blanche, c’était beaucoup moins drôle. Mademoiselle était un peu groggy mais rien de bien grave. Toutefois, il a fallu s’adapter à cette nouvelle position, notamment quand on l’allongeait, car la jambe libre risquait de supporter trop de poids.
Ca donne quels résultats ?
Au bout des quatre mois, après une radio de contrôle qui a confirmé que c’était plutôt bien parti, on a enfin pu retirer le plâtre (quatre mois sans lavage, je vous laisse imaginer l’aspect et l’odeur) pour… poser des attelles.
La suite au prochain numéro !