Villa Kérylos

La Villa Kérylos, c’est une célèbre maison de la Côte d’Azur, construite au début du xxsiècle par Théodore Reinach, le frère de Joseph et Salomon. J, S, T. Je Sais Tout. Ces trois inséparables frères, aussi moustachus qu’érudits, ont fait de cette maison tout entière décorée en style grec, la caverne aux trésors de l’érudition française. Elle a permis à Achille de sortir de son milieu. Il découvre ainsi un monde de rêve et de poésie.
Achille. Quel Achille ? Mais bien sûr, le fils de la cuisinière des voisins, les Eiffel ! À force d’études, il est devenu presque aussi savant que ses trois hôtes. Dans son grand âge, bien des années ayant passé, il revient à Kérylos. Pièce après pièce, il va à la redécouverte de son passé. Une porte s’ouvre sur Alexandre le Grand ; une autre, sur le Mont Athos ; une autre, surtout, sur Ariane, son si cher amour…


Je me suis immédiatement laissée tenter par ce livre quand je l’ai aperçu sur une table de mon libraire : j’adore Adrien Goetz, et j’ai toujours rêvé de visiter la Villa Kérylos dont j’ai entendu parler dans mon enfance.
Il m’a été facile de me laisser happer dans cette histoire, qui mêle le récit de la construction de la maison, une brève quoique dramatique chronique de la famille Reinach (grande famille juive du début du siècle, exterminée pendant la seconde guerre mondiale), et roman d’apprentissage aux accents parfois picaresques. Ces multiples histoires sont toutes racontées par la voix d’Achille et s’entremêlent avec aisance, un détail du présent évoquant tout de suite des souvenirs du passé.
L’écriture est toujours aussi belle, fluide, érudite sans être pénible, souvent drôle. Adrien Goetz aime les mots, l’art, la beauté, et cela se sent. J’ai été tout de suite transportée dans cette villa que je rêve de visiter depuis toujours. Toutefois, le personnage principal, avec ses qualités et ses défauts qui le rendent si attachant, a quand même quelque chose d’agaçant. Et l’ultime chapitre, en forme de dénouement, s’il permet de faire une de ces passerelles entre art et vie quotidienne que l’auteur affectionne tant, m’a laissée un peu dubitative.

Villa Kérylos, Adrien Goetz, Grasset

Reading challenge 2017 : a book that is a story within the story

La nouvelle vie d’Arsène Lupin

Arsène LupinArsène Lupin revient. Un héros des années 10, lui ? Oui : des années 2010 ! Le gentleman-cambrioleur, plus sportif, gouailleur, élégant et désinvolte que jamais, détrousse les réseaux sociaux, enlève les scénaristes de sa série télévisée favorite, s’attaque au changement climatique, s’envole vers les émirats, et va jusqu’à faire invalider les comptes de campagnes du nouveau président de la République…


J’aime, que dis-je, j’adore le personnage d’Arsène Lupin et les romans rédigés par son “biographe” Maurice Leblanc. J’ai lu et relu certaines de ses aventures, les apprenant par cœur, tandis que d’autres me glaçaient d’effroi (L’île aux trente cercueils, au hasard). J’ai détesté (le mot est faible) le film de 2004 avec Romain Duris.
A côté de cela, j’aime d’amour Adrien Goetz et sa série historico-artistico-policière des Pénélope – j’avais chroniqué Intrigue à l’anglaise et Intrigue à Versailles, entre autres. Alors, lorsque j’ai découvert que l’un de mes écrivains favoris avait décidé de ressusciter le héros de mon adolescence, je me suis ruée sur ce livre.

Bien m’en a pris ! C’est un livre formidable : sans se départir de son style, fait de phrases claires, d’aimable ironie et de considérations artistiques, Goetz parvient à rendre à Lupin sa verve et son caractère. On croirait lire une oeuvre posthume et oubliée de Maurice Leblanc.
Chaque chapitre, dont le titre reprend celui d’une aventure passée (“La demoiselle aux yeux verts”, “Le bouchon de cristal”…), constitue une histoire indépendante, mais tous sont reliés par un fil rouge. L’auteur prend également soin de faire des allusions à la vie artistique et culturelle actuelle : Christian de Porzamparc devient Tristan de Paremparz, Herlock Sholmès est un héros de la BBC, Jirô Taniguchi est Juzo Tadamichi…. et ça marche.
Je n’ai pas pu lâcher ce roman, qui se lit tout seul et est assez court. C’est drôle, intelligent, divertissant, très bien fait. Je vous le recommande donc chaudement.

La nouvelle vie d’Arsène Lupin, Adrien Goetz, Grasset

2015 Reading Challenge : a book by an author you love that you haven’t read yet