Le bateau-usine

Ce classique décrit les conditions de vie inouïes des travailleurs à bord d’un navire pêchant le crabe dans les mers froides et dures, entre Japon et URSS. Exploités et humiliés, ces hommes découvrent la nécessité de l’union et de la révolte. Réaliste et novateur, ce texte culte connut un succès international.


Je l’ai beaucoup dit, la période de l’entre-deux-guerres au Japon m’a toujours beaucoup intéressée. Alors pour une fois, j’ai décidé de l’aborder sous un angle différent, celui de la modernisation violente, et de ses conséquences sociales et économiques.
L’histoire est dure, empreinte d’un réalisme qui fait froid dans le dos, qui n’est parfois pas sans rappeler Zola dans la noirceur. Est-ce parce que la couverture est en noir et blanc ? Est-ce l’absence de longue description ? Toujours est-il que j’ai eu une profonde impression de monochromie dans ce texte, comme si toute couleur, comme la joie, était effacée de l’histoire.
Le récit de cette révolte lente mais qui se construit peu à peu, des abjections des uns et des autres, de l’exploitation de l’homme par l’homme est effarant, et résonne dans le lecteur. L’écriture est belle, la traduction remarquable (coup de chapeau à la traductrice qui n’a pas dû s’amuser), et l’édition actuelle propose en outre un intéressant appendice sur la biographie de l’auteur, l’histoire du texte et de sa redécouverte au prisme de la crise économique de 2008 au Japon. A noter que ce livre est, selon moi, indissociable du contexte d’écriture (montée en puissance du militarisme au Japon) et des des idées de son auteur (écrivain communiste d’origine paysanne, il a signé plusieurs récits de “littérature prolétarienne”).
Au final, c’est une oeuvre ancienne qui trouve des résonances dans notre monde actuel. Une lecture importante, mais dont on ne sort pas indemne.

Le bateau-usine, Kobayashi Takiji, éditions Allia

Reading Challenge 2017 : A bestseller from a genre you usually don’t read

Week-end à 1000 : le bilan

Ce week-end, profitant d’une relative solitude/liberté, j’ai décidé de participer au challenge “Week-end à 1000” qui revient régulièrement sur les réseaux sociaux. Le but ? Lire 1000 pages ou plus entre vendredi 19h et dimanche minuit. Pour cette première tentative, je dois avouer que je n’ai pas réussi. Entre la Crevette, quelques heures de vie sociale et les siestes impromptues dans le canapé, j’ai quand même lu un peu plus de 600 pages, soit deux romans et une grosse nouvelle. Petite revue de détail.

Le dernier des Camondo, Pierre Assouline
Cela faisait un moment que j’avais envie de lire un autre ouvrage de cet auteur, et j’ai hésité avec Sigmaringen, mais j’ai fini par jeter mon dévolu sur celui-ci, notamment car je pensais en apprendre davantage sur le musée Nissim de Camondo. La seule chose à laquelle je n’avais pas songé, c’est qu’Assouline est autant romancier que biographe… et que Le dernier des Camondo est une biographie (dans un style journalistique). Du coup, j’ai été un peu déçue de cette erreur d’aiguillage, même si j’ai passé un bon moment. Le style est agréable, l’écriture fluide, et on se laisse emporter par le destin des Camondo, ces commensaux des Rotschild à la fin du 19ème siècle mais au destin beaucoup plus tragique. Et effectivement, j’ai désormais (encore plus) envie de visiter le musée éponyme.
Reading challenge 2017 : A book with a title that’s a character’s name

Tous les matins du monde, Pascal Quignard
La semaine dernière, j’ai lu mon premier opus de Quignard, et je suis restée un peu sur ma faim. Si le style était beau, presque poétique, j’avais eu du mal à entrer dans l’histoire. Du coup, j’ai choisi un récit que je connais par cœur, car étant très fan du film – à voir absolument, tout est beau – je savais que le sujet me plairait. J’ai bien fait : cette nouvelle est un véritable bijou, c’est magnifique. Me voilà donc réconciliée (pour le moment) avec Pascal Quignard.
Reading challenge 2017 : A book that takes place over a character’s life span

Le bateau-usine, Kobayashi Takiji
Ce livre, publié par les éditions Allia, me fait de l’œil depuis sa parution en juin dernier. J’ai fini par l’embarquer vendredi sous le prétexte du week-end à 1000, et j’ai bien fait. Mais… cette lecture a été tellement marquante que je préfère vous en reparler dans un prochain article, affaire à suivre !
Reading challenge 2017 : A bestseller from a genre you usually don’t read

Au final, je suis ravie de cette expérience, qui m’a en outre permis de rayer trois catégories du Reading Challenge 2017. J’espère pouvoir recommencer avec autant, sinon plus, d’efficacité lors de la prochaine édition.

La maison au toit rouge

La vieille Taki rédige pour son neveu les souvenirs de ses années de service, avant guerre, dans la petite maison de style occidental que M. Hirai, sous-directeur d’une entreprise de jouets florissante, a fait construire à Tokyo pour sa femme. Taki se souvient avec ferveur de son quotidien dans le foyer de Tokiko, de l’intimité qui se noue entre les deux femmes, pendant ce qui fut, pour elle, un long moment de bonheur. Elle évoque l’amour platonique entre les époux Hirai puis les sentiments de Tokiko pour un jeune dessinateur de la fabrique de jouets, Jôji Itakura. L’atmosphère se tend, le commerce périclite tandis que les préparatifs de la guerre envahissent peu à peu le quotidien. Les amants auront-ils le temps de s’aimer ?


J’ai acheté ce livre quelques jours après avoir fait l’acquisition de Les dames de Kimoto, pour lequel je m’enthousiasmais déjà. Le résumé de ce roman, qui me proposait une histoire d’amour “à la japonaise” (regards en biais, effleurements, silences…), m’a interpellée, ainsi que la période de l’entre-deux-guerres, un moment de l’histoire du Japon qui me fascine. Quoi qu’il en soit, je m’attendais à une lecture sympathique et plutôt lente.
Quelque part, je ne me suis pas trompée : la narratrice use d’un langage simple, décrit sa vie à la première personne et fait revivre l’atmosphère du foyer au sein duquel elle travaillait, ainsi que le Tokyo des années 1930. Les nombreuses descriptions de repas, les menus incidents de la vie domestique, tout cela concourt à créer un rythme un peu ronronnant et apaisant.
Toutefois, la dernière partie du livre, consacrée à la guerre, ainsi que l’épilogue, situé au moment de la rédaction des mémoires, apporte une dimension nouvelle au récit, éclaire certaines choses et ajoute une légère dimension tragique. Au final, si je me suis un peu forcée pour reprendre cette lecture arrêtée au tiers au moment des fêtes, je me suis replongée dedans avec délices et l’ai terminée en deux jours. L’écriture est agréable, la traduction fluide, et l’on ne peut que s’attacher à ces personnages qui évoluent dans la maison au toit rouge comme dans un théâtre.
Le roman a été adapté en film, primé au festival de Berlin, et j’ai du coup très envie de le voir.

La maison au toit rouge, Nakajima Kyoko, Seuil

Reading challenge 2017 : A book set in two different time periods

Les Larmes

“Je n’ai jamais ressenti aucun sentiment de nation. Aucun sentiment de territoire. Seules les langues m’émerveillent.
Rare l’instant où on voit sur les lèvres d’un enfant l’instant où le son devient un mot.
Très rares les humains qui ont pu voir filmée, ou dessinée, ou enregistrée, ou narrée la scène exacte où ils ont pris origine juste avant l’instant x où ils sont conçus.
Mais plus encore l’instant de bascule d’un système symbolique dans un autre: la date de naissance de leur langue, les circonstances, les lieux dans l’espace, le temps qu’il faisait dans le site, la rivière, les arbres, la neige…. C’est une chose extraordinaire que d’être resté en contact avec la contingence de l’origine.” Pascal Quignard


J’ai reçu ce livre à Noël, ne sachant pas du tout à quoi m’attendre. Si je connais l’auteur de nom (quand même), je n’avais jamais rien lu de lui. La quatrième de couverture (qui n’est pas le texte retranscrit plus haut) propose un extrait du roman sur la fuite en avant du personnage de Hartnid, héros et fil rouge de ce récit.
L’écriture est magnifique, empreinte de poésie, d’une précision méticuleuse : chaque mot est là pour une raison, chaque mot a sa place. Le contexte évoqué de la naissance de langue française est celui de l’époque carolingienne et m’a fortement rappelé mes années de prépa. En peu de phrases, Quignard est capable d’évoquer le froid des monastères, l’opulence de Byzance, l’exotisme de Bagdad, la terreur inspirée par les Normands et, toujours, en filigrane, le rapport à la langue en tant que signifiant (“Il se plaisait à donner des noms sans voir les apparences car telle est la fonction du langage”).

En revanche, j’avoue avoir été déroutée par la forme du récit. Des parties conçues comme des “livres”, de brefs chapitres à chaque livre, un point de vue sans cesse changeant, mêlant merveilleux et réalité, termes populaires et savants, citations latines et dialogues. Il m’a semblé difficile d’entrer dans l’histoire de Hartnid, ce personnage dont on ne sait, au fond, ce qu’il fuit et ce qu’il pourchasse. J’ai suivi le récit d’un œil, captivée par la langue mais moins par ce que l’auteur avait à nous raconter.

Reading challenge 2017 (et bilan 2016)

Source (J’avoue, j’ai aussi un grand dressing – infesté de punaises pour l’instant)

Pour la troisième année consécutive, je vais me lancer dans le Reading challenge proposé par Popsugar et Goodreads. Si j’étais partie pleine d’espoir pour 2016, j’ai été stoppée net dans ma progression par la découverte des punaises de lit dans notre intérieur : outre que cela m’a littéralement bouffé le cerveau, cela m’a fait prendre du retard dans mon travail et, partant, j’ai dû rattraper tout ça sur les dernières semaines de l’année. Pendant quelques semaines, j’ai quasiment cessé de lire, et j’avais en outre cessé de noter mes lectures courant juillet. D’après mon décompte, j’ai donc lu 32 ouvrages au premier semestre (sans les BD, comics, magazines et assimilés). Vu que l’an dernier, j’en avais lu 76, on peut dire que c’est mon nouveau rythme de croisière (“nouveau” au sens de : “depuis que j’ai un boulot prenant et une Crevette”).

C’est donc reparti pour 2017 ! Petite nouveauté cette année, la liste ne comprend plus 50 propositions, mais 40, assorties de 12 supplémentaires pour les personnes “avancées”. Comme l’an dernier, je fais quelques aménagements (surtout un car la catégorie m’a profondément dérangée).

  • A book recommended by a librarian
  • A book that’s been in you TBR list for much too long
  • A book of letters (ou un roman épistolaire ?)
  • An audiobook
  • A book by a person of color Comme je pars du principe que je me fiche de la couleur de peau d’un auteur, je préfère choisir un livre sur la condition (et la discrimination) des personnes de couleur (mouvement des droits civiques, Black Lives Matter, etc.)
  • A book with one of the four seasons in the title
  • A book that is a story within the story
  • A book with multiple authors
  • An espionnage thriller
  • A book with a cat on the cover
  • A book by an author who uses a pseudonym
  • A bestseller from a genre you normally don’t read
  • A book by or about a person who has a disability
  • A book involving travel
  • A book with a subtitle
  • A book that’s published in 2017
  • A book involving a mythical creature
  • A book you’ve read before that never fails to make you smile
  • A book about food
  • A book with career advice (ma carrière professionnelle ou celle de quelqu’un d’autre ?)
  • A book from a nonhuman perspective
  • A steampunk novel
  • A book with a red spine
  • A book set in the wilderness
  • A book you loved as a child
  • A book by an author from a country you’ve never visited
  • A book with a title that’s a character’s name
  • A novel set during wartime (n’importe quelle guerre ?)
  • A book with an unreliable narrator
  • A book with pictures
  • A book where the main character is a different ethnicity from you (y’a un thème global sur l’inclusion, cette année ?)
  • A book about an interesting woman
  • A book set in two different time periods
  • A book with a month or day of the week in the title
  • A book set in a hotel
  • A book written by someone you admire
  • A book that’s becoming a movie in 2017 (catégorie déjà vue en 2015)
  • A book set around a holiday other than Christmas (challenge !)
  • The first book in a series you haven’t read before
  • A book you bought on a trip

Advanced

  • A book recommended by an author you love
  • A bestseller from 2016
  • A book with a family-member term in the title
  • A book that takes place over a character’s life span
  • A book about an immigrant or a refugee
  • A book from a genre/subgenre you’ve never heard of
  • A book with an eccentric character
  • A book that’s more than 800 pages (dommage, le second tome des Misérables est dans une caisse à la cave…)
  • A book you got from a used book sale
  • A book that’s been mentioned in another book
  • A book about a difficult topic
  • A book based on mythology