Les rêveries d’un gourmet solitaire

Taniguchi-gourmetUne vingtaine d’années après Le gourmet solitaire, Taniguchi ressuscite son personnage qui nous avait fait baver devant tous ces plats aussi appétissants les uns que les autres. Moi qui avais adoré le premier tome, c’est peu dire que j’attendais ce nouvel opus comme le Messie, d’autant que je n’ai appris son existence qu’il y a très peu de temps.

Alors, qu’en est-il ? Déjà, on ne peut pas dire que l’éditeur se soit foulé sur la couverture : on dirait qu’ils ont oublié la jaquette en couleurs ! C’est peut-être (sans doute) un choix éditorial fait en concertation avec l’auteur, mais je trouve cela particulièrement malvenu : pour un peu, on passerait à côté car il en devient invisible au rayon BD.
Le contenu est toujours aussi agréable : de courtes histoires, des anecdotes du même personnage qui se promène dans les endroits où l’entraînent ses affaires et, toujours, ce rapport à la fois gourmet et gourmand à la nourriture. La traduction est superbe – en même temps Patrick Honnoré n’est pas n’importe qui – et les notes explicatives sont à la fois intéressantes et concises.
J’ai également beaucoup aimé le rapport de l’auteur à la France développé dans l’ouvrage : outre les anecdotes et souvenirs culinaires, je pense qu’il faut interpréter le titre comme un clin d’oeil à Rousseau et ses Rêveries du promeneur solitaire (le promeneur solitaire étant un autre personnage de Taniguchi).

Quoi qu’il en soit, c’est une excellente lecture, qui met en appétit… et donne envie de (re)partir au Japon !

Les rêveries d’un gourmet solitaire, Taniguchi & Kusumi, Casterman

Les gardiens du Louvre

Taniguchi_les_gardiens_du_Louvre_vignetteDe passage en solitaire à Paris, un dessinateur japonais décide de s’accorder plusieurs jours pour explorer le Louvre et Auvers-sur-Oise. Au détour des couloirs, il croise des personnages étranges… sont-ils le fruit de son imagination, un produit de la fièvre ou, selon leurs propres dires, les gardiens du Louvre ?


J’aime beaucoup le travail de Taniguchi, et ce depuis de nombreuses années. Il fait partie des rares mangaka ayant encore droit de cité dans ma bibliothèque, car je trouve qu’il a une narration et un trait remarquables. Du coup, lorsque j’ai aperçu cet album, je ne me suis pas retenue bien longtemps (trois jours, je dirais) avant de craquer.

C’est un très bel ouvrage. Le dessin est précis – parfois, on devine la photo sous un ou deux paysages – tout en conservant une certaine douceur, peut-être apportée par la technique de colorisation (de l’aquarelle ? je ne saurais dire car je ne m’y connais pas assez). On retrouve l’atmosphère onirique caractéristique, rythmée par le monologue du personnage principal.
J’ai vraiment apprécié l’angle avec lequel le Louvre est abordé : l’auteur fait intervenir des personnalités japonaises en rapport avec le monde de l’art, établissant un lien entre la France d’aujourd’hui et le Japon d’autrefois, entre le narrateur et les peintres qu’il admire. La narration est sincère : ni trop érudite, ni faussement naïve, elle tombe juste et distille juste ce qu’il faut d’émotion.

J’ai toutefois deux regrets. Tout d’abord, j’aurais aimé connaître les circonstances de la réalisation de l’album : désir personnel du mangaka, résidence, oeuvre de commande…? Pas un mot sur le sujet au début ou à la fin de l’ouvrage. Ensuite, je trouve que le format choisi est un peu grand et contribue à donner une impression de vide dans les pages. Je pense qu’un volume de la taille des albums habituels de Taniguchi aurait été plus approprié.

Toutefois, c’était une excellente lecture, que je recommande vivement.

Les gardiens du Louvre, éditions du Louvre/Futuropolis, 20€