Mardi 21 juillet, à une heure trop matinale pour être honnête, j’émerge de la maison, direction l’aéroport Charles-de-Gaulle. Après un vol long et ennuyeux – et une attente dans le RER, la salle d’embarquement, le train… tout aussi longue – j’arrive enfin au coeur de Manhattan pour récupérer les clés de ce qui sera mon chez-moi pour la semaine : un ravissant deux-pièces à Brooklyn.
La fatigue et le décalage horaire ont vite raison de moi, même si je me force à sortir pour m’exposer le plus possible au soleil et recaler mon horloge biologique. Non loin de l’hôtel où doit se tenir la conférence, je retrouve mon éditrice pour un rapide dîner, avant de rentrer m’écrouler “chez moi” à 22h.
Mercredi 22 juillet, les choses sérieuses commencent. Je dois retrouver M. Editeur pour procéder ensemble à notre enregistrement (en clair, récupérer nos accréditations et l’énorme sac de goodies rempli de bouquins gratuits). Bien évidemment, je n’arrive à le joindre qu’en arrivant sur place, il me promet d’arriver d’ici une vingtaine de minutes… et me fait poireauter près d’une heure (“des minutes de coiffeur” comme dirait ma mère).
Les formalités effectuées, on échange nos premières cartes de visite avec les autres participantes – notre français est rapidement remarqué – et discutons de la situation en de la romance en France et aux Etats-Unis. Je m’éclipse retrouver C., ma bienfaitrice et logeuse, pour le déjeuner, au cours duquel je déguste une grosse salade à l’ombre d’un arbre (ce sera quasiment ma seule sortie à l’air libre en dehors des transferts d’un lieu à l’autre).
Retour à l’hôtel et… rien, en fait. Le coup d’envoi de la conférence, c’est une immense dédicace de charité pour laquelle j’ai accepté de faire du bénévolat (bonne façon de me faire des contacts), mais qui ne démarre qu’en fin de journée. Après avoir un peu erré comme une âme en peine, je retrouve le groupe de volontaires, me trouve équipée d’un ravissant tablier aux couleurs de l’événement (que je ne pourrai malheureusement pas garder) puis, pendant deux heures, suis assignée à Debra Mullins, qui peine à se déplacer et pourrait avoir besoin de mon aide. Elle est adorable avec moi, et me présente à toutes les personnes qu’elle connaît. En revanche, après trois heures passées dans l’immense salle de conférence où 200 filles dédicacent en parlant très fort, je suis complètement sonnée et dois rentrer. Un burrito au bbq coréen (New York, ville de contrastes et d’amalgames…), et au lit !
Jeudi 23 juillet, début de la “vraie” conférence. J’arrive avec 5 minutes de retard à un atelier intitulé “Comment écrire des scènes de sexe” (en gros), et ne parviens à trouver de place que par terre dans le couloir. Heureusement, je saisis l’essentiel du discours, et il y a du wifi gratuit pour tous les participants, si bien que je surfe sans retenue, comme la majeure partie de mes voisines.
J’assiste ensuite au cours de Sherry Thomas (dont j’avais adoré le roman Délicieuse, et dont la langue maternelle est… le chinois) sur le sous-entendu dans le texte, et je trouve ça formidable : intelligent, drôle, concret. Bon, le seul souci, c’est que je me dis en sortant que je suis nuuuulle et que j’écris de la merde (note : ce sentiment persistera à chaque atelier, malheureusement).
Déjeuner en solo dans un bar à salade (oui, j’avais besoin de légumes), puis je retourne à l’hôtel pour la conférence intitulée “No muse ? No problem !” sur la façon de se remettre à écrire quand on est bloquée. Plutôt marrant, mais je m’éclipse avant la fin car Miss Editrice me dit qu’elle a quelqu’un à me présenter et, après un peu d’errance, j’atterris à la dédicace de Kensington Publishing. Je fais une bonne vingtaine de minutes de relations publiques avant d’être invitée à me faire dédicacer des romans. Lorsque je demande comment ça s’organise et où on paie, on me répond : “Mais c’est gratuit, enfin, comme toutes les dédicaces”. En fait, je suis morte et arrivée au paradis, et personne ne m’a rien dit. Je rencontre certaines de mes idoles (MaryJo Putney !), en rate d’autres et repars avec “seulement” trois romans dédicacés.
Ne nous arrêtons pas en si bon chemin ! Dans la foulée, je suis invitée à la soirée donnée par l’éditeur, dans un très mignon bar burlesque (sans performeuses, snif), Duane Park. Le lieu n’est pas très grand mais a beaucoup de cachet, et leur cocktail gin-rose-concombre est à tomber (sans oublier les petites bouchées sucrées et salées qu’on nous propose). Une auteure, me voyant un peu perdue, me prend sous son aile et je me retrouve à discuter pendant une heure avec elle et ses amies.
La soirée s’achève tôt, mais je suis épuisée (mon corps est bloqué quelque part au milieu de l’Atlantique, je me réveille tous les matins à 5h30) et rentre dormir.
Vendredi 24 juillet. Mon coucher tôt hier avait une bonne raison : je dois être à 8h30 dans la salle de bal de l’hôtel, à bien 50mn de train, pour assister au grand discours de Julia Quinn, mon auteur préféré de tous les temps. J’arrive juste à temps, me fais héler par Debra qui m’a gardé une place (merci, merci !) et récupère deux livres et un petit carnet orné d’une citation de l’auteur. Bon, je finirai par me défaire des livres plus tard car je les ai déjà et que je redoute le poids de ma valise. Le discours est génial, drôle, vivant, touchant (je suis à deux doigts de pleurer)… et malheureusement je dois m’éclipser en catastrophe car j’ai rendez-vous avec une éditrice.
Ces rendez-vous durent dix minutes et servent à “pitcher” son bouquin à un éditeur ou un agent. Cela ne sera guère concluant pour moi : l’éditrice est visiblement déstabilisée par le fait que je sois d’expression française et déjà publiée, m’avouant qu’elle trouve trop compliqué d’acheter des droits étrangers… Tant pis, ça m’aura au moins servi d’exercice, et c’est pas plus mal !
Je sors trop tard pour assister à une conférence et finis par atterrir à… la dédicace Harlequin. Alors que je m’étais promis de ne plus rapporter de livre, j’en récupère tout de même trois autres, dont un de la série “Brides of Waterloo” qui m’avait fait de l’œil quelques jours plus tôt.
Une brève excursion dans un autre quartier de la ville à l’heure du déjeuner, et me revoilà sur place. Toutefois, je commence à ressentir le contrecoup de la fatigue, du décalage horaire et de la clim à fond : je suis un vrai zombie. J’erre un peu au “Trade show” où différentes entreprises proposent des produits ou services aux auteurs de romance. Cela va des éditeurs indépendants aux fabricants de goodies. Je me fais tirer le portrait par un photographe, histoire d’avoir une image de profil plus “professionnelle” – j’aime beaucoup l’actuelle, mais elle n’est pas tout à fait raccord avec mon univers.
Au final, j’atterris dans une conférence sur l’art d’améliorer son écriture, et j’ai presque envie de me prendre la tête à deux mains dès les 5 premières minutes. M. Editeur s’emmerde visiblement à sa propre conférence et nous sortons prendre l’air parce que, vraiment, c’est plus possible.
Vu que je dois retrouver une amie du Japon dans un pub de la 36è rue, je m’y dirige à pied histoire de respirer un peu. Si j’avais revu Angela en septembre dernier, cette fois-ci elle est accompagnée d’anciens de notre fac, et cela me fait bizarre de me dire que nous avons quitté cette vie il y a dix ans.
1h30 plus tard, je repars ventre à terre direction Park Avenue, pour assister à la soirée Harlequin située… à l’hôtel Waldorf Astoria, excusez du peu ! La salle est magnifique, l’ambiance agréable, le bar bien fourni (y’a du champagne ! et du bon, en plus !)… Le DJ sait s’y prendre pour faire danser 800 filles survoltées, et alterne Bon Jovi, Lady GaGa, les Bee Gees… sans oublier un petit clin d’œil à la profession avec Call me maybe. Tout ce petit monde se trémousse en chaussettes, gracieusement fournies par l’organisateur de la soirée, afin que ces dames ne se foulent pas une cheville avec leurs talons hauts (j’ai rapporté les miennes, vous pensez bien).
Je m’en vais vers 23h30, craignant de rater le dernier métro (j’apprendrai le lendemain que les trains circulent toute la nuit, groumf) et perds près de 2h à rentrer, entre lignes qui ne fonctionnent pas le soir, desserte locale et non express, marche à pied intempestive… Pfiou, c’est plus de mon âge.
Samedi 25 juillet, dernier jour… et je n’ai guère dormi, me réveillant royalement à 7h30. Je m’accorde un peu de répit, pensant arriver à temps pour l’atelier sur le héros. Las, le métro a d’autres projets pour moi. J’arrive avec quelques minutes de retard, si bien qu’il m’est impossible de trouver une place assise, et me replie vers la conférence sur les romance studies. Peu avant la fin, je gagne l’annexe du Starbucks au 8ème parce que j’ai besoin de sucre et de gras. Dans la queue, je sympathise avec Liah Penn, auteur d’urban fantasy originaire de la Nouvelle-Orléans, avec qui je finis par déjeuner.
Alors que nous finissons de grignoter des chips, Miss Editrice arrive pour me présenter Lisa, agent littéraire. Nous discutons, discutons… je l’accompagne au bar, où elle se commande à déjeuner et nous discutons un peu plus… En fait, ce sera la rencontre du séjour – je crois qu’on peut parler de coup de foudre amical. Nous passons près de trois heures ensemble avant de nous séparer pour nous changer en vue de la graaaande soirée.
Car l’apothéose de la conférence, c’est la cérémonie de remise des prix, avec robes de soirées et trophées, digne des Oscars. Notre petite délégation française, complétée par Lisa, parvient à trouver des places à une table pour y assister. Le show est calibré, drôle, parfois émouvant (cette fois-ci je pleure vraiment lors d’un discours – c’est dommage, c’est la seule fois du séjour où j’ai pris la peine de me maquiller). Je découvre plein d’auteurs qui me font envie.
Nous concluons tout ceci au bar, que je quitte à regret peu après minuit. La prochaine fois, une chose est sûre : je trouverai à me loger plus près pour rester à picoler sans arrière-pensée !